Page 16 - Des ailes pour le Brésil
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                 De coutume à la fin de la semaine, pour rejoindre l’école à pied, j’avais
               pris l’habitude pendant les derniers cinq cents mètres de scruter le ciel, de

               peur qu’un condor géant ne m’emporte dans ses serres. Ce volatile hantait
               mes rêves.










                 Au Brésil comme au Chili, les relations avec mon père étant des plus

               mauvaises, ses absences répétées étaient du pain bénit.
               Avec mon frère, c'étaient des bagarres journalières et douloureuses. Il avait

               toujours le dessus.
               Ma mère avait été obligée de trouver un emploi en ville pour subvenir aux
               dépenses de la famille.

               Ma sœur Guillemette avait la terrible responsabilité, à onze ans, de nous
               garder mon frère et moi. Nous étions insupportables et des plus hargneux.

               Un jour, perdant patience, elle m’a lancé, d’une distance incroyable, un
               grand couteau qui a atteint le bout de mon doigt. Encore une cicatrice !
               Puis ce sont les ailes d’un DC4 d’Air France qui, en

               une  cinquantaine  d’heures,  nous  transportèrent  en
               1946, de Buenos Aires à Paris.

               Pendant ce long vol, je pilais mon frère aux échecs !
               Ce  fut  mon  baptême  de  l’air,  un  début  de  vie  et  de  patience  dans  les
               carlingues d’avion, mes premiers battements d’ailes dans le ciel de nos

               continents.
               Personne ne voulut me croire quand je déclarais avoir vu des baleines, le

               nez collé au hublot de l’avion.
               Ce  fut  mon  premier  retour  à  Paris  avec  un  pesant  bagage  chargé  de
               nombreuses séquelles après des années vécus en Amérique du Sud.

               J’avais appris les rudiments de trois langues le portugais, l’espagnol, en plus
               du français que nous parlions à la maison.

               Il y avait quoi perdre son latin ?
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