Page 38 - Des ailes pour le Brésil
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                 L’avion reprit de l’altitude progressivement, lentement, pour retrouver sa
               trajectoire, son assiette de vol. Le pilote regardait sans arrêt son cadran des
               « tours minutes », signe de la santé du moteur.


                Je brûle encore d’admiration, quand je repense à ce mécanicien ruisselant
               de sueur en plein soleil, vers midi par plus de 45° C perché en équilibre
               sur une échelle métallique réparant le moteur défectueux. Ce sous-officier

               s’évertua  à  régler  méticuleusement  les  carburateurs  défaillants  à  trois
               reprises, afin que nous puissions redécoller dans les meilleures conditions
               après plusieurs essais infructueux en bout de piste. Pendant les essais au
               décollage,  du  nom  de  « point  fixe »,  l’avion  immobilisé  sur  le  tarmac

               semblait  vouloir  constamment  se  désintégrer  et  le  bruit  des  moteurs
               tournant à plein régime était assourdissant. Pendant le vol du retour, nous
               avions la peur au ventre en pensant que le moteur pouvait nous lâcher de

               nouveau ! Nous étions à la merci de ces damnés « tours-minute », même si
               nous  savions  que  cet  appareil  pouvait  voler  avec  un  seul  moteur.  Les
               questions qui nous préoccupaient étaient de savoir, en cas de nouvelle
               avarie, combien de temps l’avion pourrait voler, et où il pourrait atterrir

               sans trop de casse, dans le désert ou dans la brousse.

               Pendant notre séjour à Port Étienne, nous avions chargé avec précaution
               de  lourdes  caisses  de  matériel,  sans  oublier  quelques  bouteilles  de

               whisky et  de  pastis.  À  cette  époque,  les  boissons  alcooliques  étaient
               détaxées  dans  ce  pays  et  les  militaires,  en  bons  consommateurs,  en
               profitaient largement.

               En  février  1958,  la  Mauritanie  étant  en  zone  militaire  saharienne,  le

               ravitaillement par voie aérienne était vital.

               C’est la raison pour laquelle plusieurs opérations militaires nous furent
               confiées et un peloton de l’armée de l’Air était basé dans la ville d’Atar, au
               camp Lecocq.


               La vie à Atar, en plein désert, comme celle de tous les postes avancés des
               régions désertiques et dissidentes n’avait rien de réjouissante.

               Notre  mission  consistait  à  surveiller  les  frontières,  pour  éviter  les

               infiltrations des fellaghas.

               Nous étions en pleine guerre d’Algérie, avec en plus, des troubles du côté
               du Maroc Espagnol…
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